lundi 31 janvier 2011

Femmes de Tunisie et d'ailleurs....

Puis-je être considérée comme une femme de Tunisie?

Oui, je le pense, car même si je n'ai pas la nationalité tunisienne de fait, je suis plus tunisienne que bien d'autres, vivant dans ce pays depuis plus de 40 ans.

Je suis née belge et je le reste par mes racines mais la majorité de ma vie de femme, je l'ai passée dans ce pays. Je suis en effet arrivée, toute jeune mariée à 20 ans et j'ai construit ma vie ici.

J'avais rencontré mon mari, lors de mes études. Il avait la nationalité marocaine mais était né et avait toujours vécu à Tunis.(Il n'était donc marocain que de nom, mais tunisien de culture!)
Ce fut le coup de foudre, mais le coup de tonnerre dans ma famille....
Comment une petite bourgeoise pouvait-elle "s'encanailler" et vouloir se marier avec un Arabe?

A l'époque, la fin des années 60, c'était inconcevable dans les familles judéo-chrétiennes bien-pensantes!

Il a fallu lutter, se battre pied à pied, entendre les pires "horreurs" de la part de ceux qui , normalement doivent nous soutenir (famille et parents) avant de devoir se fâcher et partir, un peu comme une voleuse, pour suivre l'homme que j'avais choisi.

Suite à l'intransigeance de ma famille, je me suis donc retrouvée du jour au lendemain dans un pays que je ne connaissais absolument pas, au climat et aux mœurs complètement différentes du mien et dont je ne comprenais pas la langue....

Ce fut parfois très dur, mais j'ai eu la chance d'être accueillie par une belle-famille très tolérante, bien que vivant d'une manière tout à fait ancestrale.

Et petit à petit, parfois très seule (le barrage de la langue et du manque d'amis est parfois très handicapant), j'ai construit ma vie avec des hauts et des bas.

Mes deux enfants sont nés ici: je les ai élevés seule, mon mari ayant un métier très prenant.
J'ai renoncé à travailler afin de pouvoir leur donner l'éducation que nous désirions: ouverte sur les deux cultures sans en privilégier une plus que l'autre.
Les débuts furent difficiles, mais grâce à des sacrifices des deux côtés et le respect de nos idées réciproques, je me suis sentie devenir autant tunisienne que belge.

Bien sûr, mes racines resteront toujours dans mon pays natal que j'ai besoin de retrouver régulièrement, mais bien que le critiquant souvent et en "râlant" parfois beaucoup, je me suis aperçue que j'étais devenue partie intégrante de la Tunisie, et ce , surtout à la lueur des derniers événements que j'ai vécu dans l'angoisse. En effet, je me trouvais en Belgique au moment du déclenchement de la révolte salutaire de la jeunesse du pays, et empêchée de rentrer tout de suite comme prévu par mon mari et mon fils ainé qui redoutaient l'issue des conflits.

Cette jeunesse, je la connaissais bien, car après avoir éduqué mes enfants, je suis devenue professeur de français pour les élèves des écoles tunisiennes. Parfois, je doutais de son avenir, vu la mentalité de certains que je trouvais très centrée sur leur petite personne.
Et puis, je me suis aperçue qu'ils étaient bien plus mûrs et responsables que ce que je pensais et que, dans le malheur, une grande solidarité, que je croyais perdue, s'est faite jour.
Et je me dis maintenant que c'est cette jeune génération qui va reconstruire moralement et matériellement ce pays si beau, mais tellement spolié par des "mafieux" sans scrupules et ce pendant tant d'années.

Voilà pourquoi, je me considère aussi comme tunisienne, ayant participé à la vie du pays depuis de si nombreuses d'année.

Qu'en pensez-vous? J'attends vos réactions à vous toutes, femmes de Tunisie....